Inventée suite au Grenelle Environnement en 2007, la notion de trame verte désigne en premier lieu un outil d’aménagement du territoire visant à freiner la consommation d’espaces naturels, et ainsi la perte de biodiversité dont elle est la cause. Le terme s’utilise à la fois pour parler d’une méthodologie d’aide à la décision, permettant de déterminer les espaces à préserver ou restaurer en priorité, et pour décrire ces espaces jugés prioritaires. Elle s’intègre plus généralement au concept de Trame verte et bleue, qui désigne le réseau d’habitats naturels ou semi-naturels permettant le cycle de vie des espèces sur un territoire donné.
Pourtant, différents acteurs de l’aménagement accordent à cette expression des significations variables, tantôt compatibles, tantôt rivales, selon les projets.
Une notion d’écologie du paysage
La trame verte, au sens de l’écologie scientifique, repose sur un double enjeu.
Quantitatif : éviter la diminution des milieux naturels en terme de surfaces – la surface « totale » non urbanisée, mais aussi celle de chaque type de milieu, ou encore la surface d’un espace naturel donné.
Qualitatif : éviter la simplification et l’uniformisation des écosystèmes, en assurant une diversité d’habitats et en favorisant leurs interactions. Ce dernier point, désigné par le terme de « continuité écologique », est souvent illustré par la capacité de déplacement des individus à travers le territoire, nécessaire à la survie de l’espèce (alimentation, repos, reproduction, colonisation de nouveaux habitats…).
Une expression polysémique
L’usage courant de l’expression « trame verte » s’étend toutefois à des réalités différentes, parfois associées à la problématique de biodiversité, mais pas équivalentes à celle-ci :
- la trame verte « paysagère » : reprenant l’idée d’une continuité d’espaces végétalisés (les fameux espaces « verts »), il s’agit d’aménagements faisant la part belle aux plantations. Ils peuvent avoir un intérêt certain pour la biodiversité, lorsqu’ils offrent effectivement des habitats et des ressources nécessaires aux espèces locales et favorisent des échanges entre les milieux naturels voisins. Mais l’utilité écologique est parfois sacrifié au profit de l’attrait esthétique, selon les choix d’espèces plantées, leur disposition, leur entretien, ou leur articulation avec le reste du territoire ;
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la trame verte « mobilités » : l’expression désigne ici la circulation non pas des espèces sauvages, mais celle des humains, via des modes de déplacement plus « verts » que la voiture individuelle (au sens de « moins dommageables pour l’environnement ») : chemins piétons, pistes cyclables, transports en communs, etc. La mise en œuvre de ces alternatives s’accompagne parfois d’un renforcement des continuités écologiques (plantation d’arbres, aménagement de noues, création de parcs…). Mais lorsqu’elles sont trop artificialisées, leur intérêt au regard de la biodiversité est faible, voire nul.
Les différents sens donnés aux trames vertes ont tous leur raison d’être et répondent chacun à des enjeux essentiels. Lorsque cela est possible et pertinent, il est évidemment préférable de les combiner, pour améliorer conjointement la qualité écologique des lieux, le cadre de vie et le fonctionnement urbain. Dans d’autres cas, il est nécessaire d’arbitrer et de donner la priorité à l’un ou l’autre de ces usages.
L’important est de toujours identifier clairement les fonctions que l’on attend d’une « trame verte », pour lui donner les moyens de les remplir efficacement.